Bonjour, bienvenue au MOOC des villes africaines, environnement, et enjeux de développement. Aujourd'hui nous allons entamer la leçon qui porte sur l'assainissement urbain des eaux usées et excretas. En 2012, sur les 748 millions de personnes vivant dans les villes du monde qui n'avaient pas accès à une installation d'assainissement améliorée 200 millions, soit 27%, vivaient dans les villes de l'Afrique subsaharienne. L'Afrique subsaharienne est ainsi l'une des régions du monde où les niveaux de couverture demeurent les plus faibles. Au cours de cette leçon, nous allons dans un premier temps définir ce que c'est que l'assainissement, ensuite, nous présenterons le schéma général de l'assainissement, avant de parler des différentes options techniques des maillons. Après cela, nous analyserons la situation de la couverture en matière d'assainissement, enfin, nous terminerons par la question cruciale qui est celle du financement de la filière. L'assainissement d'un espace urbain consiste à éloigner les habitations, les eaux usées, et les excretas pour réduire les nuisances, puis à les traiter avant leur rejet dans le milieu naturel. Cela nécessite de mettre en place des installations, d'assurer leur entretien et leur bon fonctionnement, mais ces actions à elles seules ne suffisent pas. Il faut, en plus, assurer l'amélioration des conditions d'hygiène liées aux pratiques et comportements des habitants, la promotion de comportements adaptés, tels que le lavage de main et l'entretien des ouvrages, et la préservation de l'environnement. On parle d'assainissement collectif lorsque les ménages sont connectés à un réseau d'égouts pour évacuer leurs déchets liquides. Quant à l'assainissement, il correspond à la situation où les équipements sanitaires, c'est-à-dire les latrines, les toilettes à chasse, et éviers, ne sont pas reliés à un réseau d'égouts, mais plutôt à des fosses ou puisards. L'assainissement doit être considérée comme une filière organisée en trois maillons ayant chacun sa propre spécificité avec des acteurs, des compétences. des métiers, et des modalités de financement qui peuvent relativement différer. L'approche globale de l'assainissement par maillons est le résultat d'un programme de recherche et d'actions pilotes mené en Afrique notamment par le programme solidarité eau. Divers options techniques existent à chaque niveau ou étape du processus d'assainissement des eaux usées domestiques et des excretas. Le maillon amont consiste à l'accès à l'assainissement ou à la collecte au niveau des ménages, le maillon intermédiaire consiste à l'évacuation hors du quartier, et enfin le maillon aval consiste à l'épuration ou au traitement des eaux usées et des excretas. Ces options techniques sont fonction du contexte urbain, quartiers centraux, quartiers périphériques, zones d'habitat de haut standing, de la nature et de la topographie du site, du climat, et doivent aussi prendre en compte les contraintes économiques locales et les capacités de mise en œuvre et d'appropriation des différents acteurs concernés. Le premier maillon ou maillon amont de l'assainissement consiste à la collecte des déchets liquides produit par les habitants et leurs activités domestiques ou économiques. Il fait appel à deux types d'installations sanitaires, autonomes ou raccordées à un réseau pouvant être individuel ou semi collectif. Les systèmes autonomes ont des formes techniques très variées. Ils apparaissent comme les formes d'assainissement les plus appropriées pour répondre de manière satisfaisante aux politiques de développement massif de l'assainissement. Ils ont fait l'objet de nombreuses recherches-actions démontrant la variété des questionnements et des innovations liées à la diversités des situations urbaines existantes. Les solutions autonomes les plus courantes sont les latrines à fosse non maçonnées, la latrine à fosse maçonnée, la latrine à fosse ventilée, la latrine à siphon, la toilette moderne à fosse simple, la toilette moderne à fosse septique. Et pour ceux qui ne disposent pas de ces commodités, c'est la défécation en plein air. On note aussi une diversité des systèmes autonomes semi-collectifs, tels que les latrines publiques situées dans les lieux publics à forte fréquentation, ou les latrines communales partagées par des groupes de familles locataires d'habitat social dans les quartiers denses, ou enfin les latrines familiales pour plusieurs ménages. Le second maillon ou maillon intermédiaire consiste à assurer l'évacuation hors des zones d'habitat des eaux usées au bout des vidanges. Elle se fait soit par un réseau d'égouts conventionnel, soit par des mini réseaux, soit par des véhicules mécanisés, dotés d'une pompe aspirante, soit de manière manuelle par des artisans ou des membres de la famille. Cette évacuation peut être périodique par vidange, ou permanente par réseau. Ce sont des artisans avec des outils rudimentaires ou des camions munis de systèmes d'aspiration mécanique qui effectuent la vidange. Les boues et les eaux des vidanges sont évacuées ensuite vers des centres de dépotage ou de traitement situés à l'extérieur de la ville ou à l'extérieur voire même à l'intérieur de la parcelle lorsqu'il s'agit de la vidange manuelle. Le marché de la vidange en pleine construction connait une évolution qui peut varier selon les pays et les villes grâce notamment à des innovations entreprenariales ; dans la plupart des cas, ce secteur s'est développé sans aucune stratégie de la part des pouvoirs publics, mettant ainsi en exergue la capacité d'adaptation et d'innovation du secteur privé. Le réseau d'égouts est bien adapté aux zones urbaines à forte densité de population et où l'eau est utilisée en abondance. Les équipements sanitaires à chasse d'eau et liés aux égouts se rencontrent le plus souvent dans les quartiers d'habitats à standing des grandes agglomérations urbaines, telles que Abidjan, Dakar, pour ne citer que celles-là. Il présente cependant des inconvénients qui limitent son extension à l'ensemble du territoire urbain. En effet, les coûts d'investissement et de fonctionnement sont très onéreux, et ils nécessitent des équipements spécifiques, et une main d'œuvre qualifiée. Très peu d'investigation novatrice ont été faites sur ces systèmes. Pourtant, il en existe tel que le réseau à faible diamètre appelé encore assainissement semi-collectif. Il s'agit d'un mode d'assainissement adapté à un petit groupe d'habitations et constitué d'un réseau d'égouts à petit diamètre enterré à une faible profondeur sur des terrains privés ou en bordure de la voirie relié à un système de traitement sommaire décentralisé. Le maillon aval consiste au dépotage et au traitement des produits de l'assainissement avec ou sans réutilisation ou valorisation. Le traitement de ces produits peut se faire sur place, à la parcelle, plus ou moins partiellement, ou bien, de plus en plus fréquemment quand ces produits ont été évacués hors des quartiers. Avec la diffusion et l'amélioration massive des systèmes autonomes d'assainissement, et avec le développement accéléré des entreprises de vidange mécanique, les quantités de boue des villages à traiter convenablement deviennent progressivement considérables. Or ce dernier maillon de l'assainissement reste dans les faits le plus critique. La plupart des villes africaines ne disposent pas d'équipement adéquats. Et lorsqu'il en existe, les responsables de ces services sont confrontés à des difficultés pour assurer leur bon fonctionnement. Ces situations favorisent le dépotage sauvage en périphérie des villes. La plupart des grandes villes optent pour une solution mixte combinant assainissement autonome et collectif. L'assainissement autonome ou semi-collectif fait appel à deux types d'options. L'auto épuration qui consiste à éloigner les eaux usées des habitations par des canalisations jusqu'aux zones où elles peuvent s'infiltrer dans le sous-sol, qui assure cette dépollution naturelle, ou la fosse septique qui permet de liquéfier les matières sous l'action des bactéries présentes dans les effluents et de décanter. Cependant, elle ne joue qu'un rôle de prétraitement. Les effluents résiduels devant être évacués vers un système de traitement adapté qui sont constitués soit de simples tranchées et d'épandages, sol sableux souvent reconstitués par des matériaux adéquats quand le terrain ne peut jouer un rôle épurateur, ou soit de filtre à sable ou de tertre d'infiltration. Dans les zones où il n'existe pas de traitement sur place, ou celles qui sont équipées de réseaux d'égouts, le traitement des eaux usées se fait dans les stations d'épuration. Il s'agit de reconstituer un milieu naturel permettant d'accélérer le processus épuratoire de la nature par l'action des bactéries. Il existe plusieurs systèmes d'assainissement, dont les moins coûteux et les plus accessibles pour leur exploitation sont le massif filtrant qui consiste à infiltrer les effluents à travers un massif de sable permettant la dégradation de la matière organique et l'élimination des matières en suspension par filtration et des micro organismes pathogènes par filtration et absorption, et le lagunage qui est une technique naturelle de filtration par des micro organismes, des algues et des plantes aquatiques. L'épuration naturelle des eaux usées domestiques est assurée par un temps de séjour dans des bassins étanches de différentes profondeurs, durant lequel, sous l'effet conjugué du soleil et de l'oxygène, se produit et s'entretient un cycle de développement de bactéries responsables de la dégradation de la matière organique. Ce système est particulièrement adapté au traitement de faibles volumes. Les systèmes d'assainissement varient d'une ville à l'autre. Le programme commun OMS Unicef les classe en deux grandes catégories. Les installations d'assainissement améliorées : sont considérées comme installations d'assainissement améliorées les installations assurant la séparation hygiénique des excrétas humains empêchant tout contact avec les personnes. Il s'agit notamment des installations suivantes : les toilettes à chasse d'eau vers un système d'égouts avec canalisations ou vers une fosse sceptique, et des latrines améliorées à fosse ventilée. La seconde catégorie est celle des installations non améliorées, c'est-à-dire celle qui n'assure pas une séparation hygiénique des excrétas humains en empêchant tout contact avec les personnes. Les installations non améliorées comprennent les latrines à fosse sans dalle ou plateforme, les latrines suspendues et les latrines à seau. Quant aux installations partagées à cette table mais utilisées par deux ou plusieurs ménages et aux installations partagées au public, elles ne sont pas considérées comme des installations améliorées. À ces dispositifs non améliorés, il faut rajouter la défécation en plein air. En effet, les personnes qui ne disposent pas de ces commodités déposent leurs excrétas dans les champs, les buissons, les plans d'eau, sur une plage, ou dans d'autres espaces ouverts, ou sont éliminés avec les déchets solides. Comme nous pouvons le voir sur ce tableau, en 2012, plus de la moitié des pays avaient un taux de couverture inférieur à 50 %. Ils se situent principalement en Afrique occidentale, centrale et orientale. Une douzaine avait un taux de couverture compris entre 50 et 76 pour 100 : ils se situent en Afrique occidentale et australe. Et seulement 4 pays avaient des taux compris entre 76 et 90 % : il s'agit du Maroc, de l'Angola, de l'Afrique du Sud et du Bostwana. Et seulement 6 pays avaient un taux supérieur à 90 pour 100 : il s'agit des pays du Maghreb Algérie, Tunisie, Libye et Egypte. Comme nous le montre le présent graphique relatif à l'évolution de la couverture de l'assainissement dans les villes d'Afrique sub-saharienne en 1990, 41 % des citadins vivant en Afrique sub-saharienne bénéficiaient d'installations d'assainissement améliorées. Malgré les efforts consentis, cette proportion n'a pas augmenté et est restée stagnante en 2012. En revanche, la proportion des habitants utilisant des installations partagées a connu une légère hausse de 6 points passant de 29 % en 1990 à 33 % en 2012. La proportion de ceux utilisant les autres installations non améliorées a baissé légèrement de 3 points, passant de 20 % en 1990 à 17 % en 2012. Malgré les efforts accomplis, l'assainissement demeure le plus lourd des défis pour l'atteinte des OMD liés à ces secteurs. Plus de la moitié de la population urbaine ne bénéficiait pas d'installation hygiénique pour leurs besoins, et environ un dixième continue à déféquer en plein air. Cette situation cache des inégalités entre les pays et les villes. À l'échelle des pays, les données issues des enquêtes démographiques et de santé à indicateurs multiples nous révèlent que les taux d'accès à des installations améliorées varient selon les pays. Au Cameroun et au Sénégal, plus de la moitié de la population urbaine possède des installations améliorées, tandis que dans les autres pays, Niger, Côte d'Ivoire et RD Congo, ce taux est inférieur à 50 %. Environ un habitant sur trois utilise des installations partagées. Il s'agit des personnes vivant dans des cours communes. En République Démocratique du Congo, les trois cinquièmes de population urbaine recourent à des installations non améliorées, 31,9 % à des installations partagées, et 43 virgule 7 pour 100 à des installations non améliorées. La défécation en plein air est une pratique assez courante dans les villes nigériennes où 13 % de la population s'adonne à cette pratique. A l'échelle des villes, on observe également une disparité entre villes capitales et les autres villes. À Niamey, la moitié des habitants utilise des installations partagées. À Yaoundé, à Douala et dans les autres villes du Cameroun, un peu plus de la moitié de la population utilise des installations améliorées. Dans les autres villes du Niger, près de deux habitants sur dix défèquent en plein air. Financer de manière globale et pérenne le secteur de l'assainissement est un grand défi pour les autorités municipales et nationales. Aborder la question du financement de l'assainissement par maillons, comme l'ont démontré certains auteurs, semble être une approche plus adaptée et logique, chaque maillon pouvant être pris individuellement et successivement. Le financement de l'accès des ménages des villes africaines à l'assainissement se fera dans une très grande majorité par des systèmes autonomes d'assainissement. De nombreuses études et recherches actions réalisées ces dernières années ont révélé l'ampleur des besoins des habitants en installations autonomes d'assainissement et démontré leur capacité à payer pour ces services. L'instauration de la redevance assainissement sur la facture d'eau potable et l'utilisation judicieuse du produit de cette redevance pour réaliser les plans stratégiques municipaux d'assainissement au Burkina Faso depuis plus d'une dizaine d'année prouve que le financement progressif de maillons amonts de l'assainissement est faisable sans un appui extérieur. Quant au financement de l'évacuation hors des quartiers, il s'agit surtout de financer l'enlèvement des boues et eaux de vidange. En effet, de plus en plus de ménages utilisent des installations autonomes et recourent à des vidangeurs. Par contre, la question est plus complexe dans le cas de l'évacuation par réseaux d'égouts. Toutefois, il faut distinguer deux cas de figure, celui du mini réseau et des tronçons tertiaires, et des tronçons primaires et secondaires d'égouts, ces derniers étant très coûteux. Le financement du dépotage et traitement est le maillon pauvre de la filière où l'aide internationale doit se focaliser. Nous pouvons conclure en disant que, en Afrique subsaharienne, l'assainissement autonome non collectif est le mode d'accès le plus répandu. Même si les grandes villes, notamment les villes capitales, continueront à mettre en place des réseaux d'assainissement collectifs, la tendance à l'assainissement autonome continuera à demeurer très forte. Avec la diffusion et l'amélioration des systèmes autonomes d'assainissement et le développement accéléré du marché de la vidange mécanique, les quantités de boues à traiter de manière convenable augmentent considérablement. Or, le dernier maillon continue de demeurer critique. Aussi, les financements publics et l'aide internationale devraient notamment se focaliser sur ces maillons. Au revoir et à la prochaine leçon sur le thème assainissement pluvial. [AUDIO_VIDE]